Tuk Tuk Tour ou la fainéantise du touriste

On se l’était juré, promis, craché : nous ne tomberions plus dans la facilité en voyage. Terminé les plans trop faciles, rarement exaltants, trop souvent décevants. Enfin, ça, c’était avant.

Car, une fois de plus, nous sommes tombés dans le panneau. Enfin, le panneau nous est tombé dessus et nous avons été trop fainéants pour nous en écarter. On est pas très fiers de nous, mais on vous le raconte quand même. Après, c’est terminé, basta, over !

Le scénario de cette journée « Tuk Tuk Tour »

Acte I, scène 1
Extérieur, jour : Fort Galle, Sri Lanka en fin de journée.

Nous rencontrons dans la rue l’homme qui nous avait recommandé la guesthouse de sa sœur (qui est finalement devenue sa cousine au fil de la conversation). Il nous demande ce que nous faisons demain. Pas grand-chose de prévu : en une journée, nous avons déjà fait le tour des fortifications de cette très belle ville, et découvert succinctement (mais suffisamment) la chaotique « nouvelle ville ».

L’homme nous propose de nous arranger un tour en tuk tuk avec de multiples visites : des temples en veux tu en voilà, une fabrique de thé, un grand jardin d’herbes et de plantes médicinales, un centre qui œuvre pour la préservation des tortues marines, une plage tranquille, des pêcheurs qui pêchent du haut d’un grand pic en bois plantés en pleine mer, et j’en oublie certainement d’autres.

Nous avions effectivement vaguement lu dans le guide qu’il y avait une magnifique plage à proximité ainsi qu’un grand jardin d’herbes et de plantes médicinales, alors banco ! À cela, on rajoute à notre « package » les pêcheurs et les tortues et rendez-vous est pris pour le lendemain. Et attention, pas « au prix touriste » : notre homme nous assure qu’il nous envoie un tuk tuk « public » que l’on payera au kilomètre.

Nous ne sommes pas peu fiers de ne pas tomber dans un « truc à touriste ». Nous sommes des voyageurs, yeah !

Acte II, scène 1
Extérieur, jour : Guesthouse Fort Fifty Inn, Galle, 10h30.

Notre jovial chauffeur de tuk tuk arrive. Je m’enquiert qu’il connaît bien les différents arrêts que nous souhaitons faire (il essaie d’en rajouter, « tea factory, good! », mais c’est OK) et que, comme prévu, la course se fait bien au kilomètre (il rigole en me disant « OK », hmm…). Puis c’est parti, à fond le guidon (de tuk tuk) !

Il faut avouer que sorti de la ville et des pots d’échappement, la ballade en tuk tuk en elle-même est agréable et revigorante : l’air frais dont on manque parfois est ici disponible à profusion d’autant plus qu’il pousse sa machine à fond (ce n’est pas une formule 1 non plus, 60km/h doit être son maximum. « Doit être », car à ce moment-là, je me demande comment il compte nous faire payer au kilomètre sachant que son compteur est vraisemblablement cassé… Finalement, devant la mauvaise foi du conducteur sur le nombre de kilomètres que nous allons parcourir avec preuve à l’appui de Google Maps, nous nous mettrons d’accord sur un forfait 😉 ).

Acte II, scène 2
Extérieur, jour : centre de préservation des tortues marines, 11h.

Premier arrêt : le centre de préservation des tortues marines. Accueil peu chaleureux de prime-abord, entrée chère pour le pays (500 roupies, soit 3 €) et espace assez réduit. Quelques minuscules bassins avec d’énormes tortues à l’intérieur, d’autres avec de toutes petites tortues et une mini-plage artificielle avec des oeufs en attente d’éclosion. Un homme nous interpelle pour nous proposer de nous faire la visite. Il finira par nous avouer que cet endroit n’a pour vocation que de récupérer l’argent du touriste et nullement de sauver les tortues (sic). Ainsi, si les grosses tortues sont bien effectivement rescapées des filets de pêche, le centre les conserve plus de temps qu’il leur faudrait pour se remettre de leurs émotions ou blessures (qui de toute façon ne sont pas soignées : cela coûterait trop cher !) afin de pouvoir les exhiber aux touristes. Car voir simplement des oeufs, ça n’excite pas les touristes… Le pire, c’est que gardé trop longuement en captivité, ces tortues auront beaucoup de difficultés à se nourrir elles-mêmes lorsqu’elles retourneront dans leur milieu naturel (re-sic).

Notre guide un peu blasé qui nous explique que ce centre est une vaste fumisterie...
Notre guide un peu blasé qui nous explique que ce centre est une vaste fumisterie…

Acte II, scène 3
Extérieur, jour : les pêcheurs, 11h45.

Nous poursuivons la route pour aller voir les pêcheurs. Sur la plage, des pics, mais pas de pêcheurs. Notre chauffeur est contrarié. Il finira par nous en débusquer 4 ou 5 un peu plus loin. Ces pauvres « pêcheurs » n’ont pas l’air de pêcher grand-chose. Plutôt d’attendre dans une position inconfortable quelque chose… Mais quoi ? Tiens, il y a en un qui me fait coucou de la main. Non… Quand même pas… Ils ne seraient pas capables de faire ça… « — photo 200 roupies, sir ». Ah, si, ils en sont capables. (Donc pas de photo des pêcheurs, na !)

Acte II, scène 4
Extérieur, jour : the beach, 12h30.

Après le fiasco de la matinée, nous n’avions qu’une seule envie : nous retrouver sur la petite plage quasi déserte à la végétation luxuriante dont parle le Lonely Planet. Vous le voyez venir ? Et bim, bienvenue à béton land : une belle plage bordée de cocotiers constructions. Puis, comme par hasard, notre chauffeur nous dépose dans un restaurant de plage précis où sont également stationnés des dizaines d’autres tuk tuk. Je ne suis pas du genre parano, mais je serais étonné qu’il ne touche pas de commission sur ce que l’on aurait dépensé dans ce restaurant. Par esprit de contradiction, nous choisissons donc de traverser la plage et de nous installer ailleurs.

Acte II, scène 5
Extérieur, jour : le jardin de plantes médicinales, 16h.

Après un repas aussi peu local qu’original, une sieste (pour Éléanor) et un bain de mer (pour moi), nous repartons avec notre ami le chauffeur de tuk tuk pour l’ultime étape de la journée : le jardin des plantes et herbes médicinales. Cette fois, impossible de se tromper. Ce lieu est référencé sur le guide dans les incontournables. Bien entendu, dès en arrivant nous avons un doute : s’agit-il du bon endroit ? Celui-ci nous paraît petit et, pour tout dire, « cheap ». La visite le confirmera : notre guide nous donnera des explications basiques sur une dizaine de plantes qui, comme par hasard, sont vendues en solutions prêtes à l’emploi dans la boutique. Et tous ces produits ne respirent pas la grande qualité…

Acte II, scène 6
Extérieur, jour : le parc de Galle, 17h.

Fin de notre tuk tuk tour. La fin de la journée est pour Éléanor : nous passons une heure dans un grand parc où se côtoient parents avec enfants et couples d’amoureux. Éléanor, comme à son habitude, attire à elle une horde d’enfants et de mamans. Tout le monde veut la toucher, l’embrasser. On a quand même peur qu’elle finisse par prendre la grosse tête la gamine !! 😀

Le jeu du jour : trouvez Éléanor parmi les autres enfants présents sur la photo :-)
Le jeu du jour : trouvez Éléanor parmi les autres enfants présents sur la photo 🙂

Conclusion(s)

Ce n’est pas si grave…

  • Nous en savons un peu plus sur la corruption au Sri Lanka grâce à notre guide du centre de préservation des tortues
  • Nous nous sommes bien marrés avec les vrais-faux pêcheurs qui nous faisaient « coucou », puis le paysage aux alentours était sublime
  • Éléanor a pu faire sa sieste dans de bonnes conditions à la plage
  • Nous avons appris qu’il existait une plante aussi efficace que le viagra et une autre qui appliquée sur la peau est aussi efficace que la cire pour arracher les poils
  • Notre chauffeur de tuk tuk était malgré tout très sympa (en plus, comme nous n’avons rien acheté nulle part, il n’a pas dû toucher de commissions !) et la journée ne nous a pas coûté si cher que cela (3000 roupies, soit environ 18 €).

Pourtant, cela nous fait réfléchir :

Au fond de nous, avec notre modeste expérience de l’Asie, nous savions que cela allait se passer ainsi : pourquoi l’avoir tenté tout de même ? Réponse : la fainéantise.

Car si en effet, il n’y a pas « mort d’homme » dans cette histoire, nous avons finalement raté des choses à voir beaucoup plus intéressantes et enrichissantes.

Il vaut mieux s’informer des endroits intéressants à voir en amont (Internet, guide, locaux…) et se rendre en tuk tuk (ou autre) dans chaque endroit individuellement tout en vérifiant systématiquement qu’il s’agit du bon endroit (les chauffeurs de tuk tuk sont des malins !).

Nous nous étions déjà dit cela, mais voici une bonne piqûre de rappel pour que désormais nous ne soyons plus passifs dans les visites. Il ne s’agit pas non plus de ne jamais s’en remettre au hasard, cela est différent. Je parle bien ici de se laisser conduire dans des endroits où, presque à chaque fois, la personne qui vous emmène à un intérêt financier à le faire (le plus souvent sous la forme d’une commission).

10 réflexions au sujet de “Tuk Tuk Tour ou la fainéantise du touriste”

  1. Hello Tony, Laeticia and Eleanor,

    Tout d’abord un grand bravo à vous pour montrer au gens que voyager en famille (avec enfant en bas âge), c’est possible! Quelle inspiration! Votre article sur votre journée tuk-tuk est fantastique, cela nous a fait penser à une histoire similaire que nous avons vécu en Thailande. Bravo à vous tout de même pour garder comme même les points positifs de cette expérience! Continuez votre super blog! C’est avec grand plaisir que nous venons de vous découvrir! En janvier 2017, nous prenons une année sabbatique. Nous comptons passer au moins 6mois en Amérique du Sud. Nous avons hâte! Vos vidéos nous donnent l’envie d’aller au Sri-Lanka. Patrick connaît se pays mais je n’y suis encore jamais allée!
    Patrick et Cécile de http://www.travel4lifeblog.com

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  2. « Nous ne sommes pas peu fiers de ne pas tomber dans un « truc à touriste ». Nous sommes des voyageurs, yeah ! »
    Ah Ah j’adore! Combien de fois nous nous sommes ainsi félicités… et parfois nous avons déchanté aussi 😉
    C’est tentant ces Packages, le repos de se laisser guider sans avoir 10 micro-décisions à prendre toutes les 5 minutes…
    Mais décevant quasiment à chaque fois… dur dur de voyager en indépendant… c’est pas des vacances tout ça !! 😉

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    • Je suis bien d’accord : voyager ce n’est pas des vacances (d’ailleurs on se fait parfois des pauses « vacances » pendant les voyages, ce que en général les gens ne comprennent pas :p )

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  3. Je serais moi aussi tombée dans cette attrape-touristes. Et comme vous dites, heureusement, il n’y a pas eu mort d’homme. Pour le petit jeu, Éléanore est à droite de la photo rendue sur le haut du jeu. Elle tranche tellement à travers les locaux. Le fait qu’on la touche et embrasse, y a-t-il un danger qu’elle attrape quelconques maladies ? Merci encore pour votre article persillé d’humour. J’aime beaucoup vous lire.

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    • Merci Bibiane pour ton gentil commentaire. Pour les maladies, c’est en effet possible mais sans doute pas plus qu’en France où les gamins se refilent leurs microbes à l’école ou à la crèche en permanence 😀
      Pour Eleanor, nous nous méfions plus des moustiques que des enfants 😉 (bien qu’il n’y ai pas de risque de paludisme ici).

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  4. Salut, merci de nous éclairer sur les pratiques touristiques mais faut il pas mieux se faire avoir par un Sri landais que par son banquier. Finalement, voyageant très peu, j’apprends grâce à vous qu’il n’y a pas qu’à Marrakech qu on peut se faire avoir. ALLEZ A TUK TUK bientôt…

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  5. coucou
    Nous suivons votre périple à distance ,sans s’éloigner pour autant de vous grâce à internet, comme quoi le progrès a du bon aussi…
    ça me rappelle un peu les voyages au Maghreb , chez l’habitant au bled au dessus de Tarroudant dans le haut Atlas.
    message plus perso: merci pour le petit mot pour mon anniversaire; ça m’a beaucoup touché car si loin et si proche à la fois .Bisous à vous trois

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  6. Nous sommes également tombé dans ce genre de faux bon plan malgré tout nous avons connu une expérience tellement belle en Inde. On était parti pour un aller simple (guest house-centre ville) et nous avons passé la journée avec un chauffeur de tuk-tuk formidable! Il a néanmoins tenté de nous conduire dans ces fameuses boutiques à touristes avec commission pour le chauffeur mais nous avons à chaque fois décliné la proposition. Finalement il nous a donné pleins d’explication et avons visité des lieux atypiques sans touristes à l’horizon 🙂 Au moment de payer on s’est dit qu’on allait souffrir car on avait rien négocié et surtout fait beaucoup de route… mais le chauffeur nous a regardé et a dit « donnez ce que vous voulez »! On était tellement scotché (car en Inde du Nord on a un peu un dollar tatoué sur la tête…) qu’on lui a filé un très gros billet, d’une part pour le remercier de nous avoir montré tant de choses et d’autre part pour cette façon de voir les choses !

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